Européennes 2024 : Profession de foi
Paix et Décroissance
Avec l’accélération de la mondialisation, l’économie de croissance capitaliste a accentué ses destructions écologiques : le changement climatique est devenu réalité, l’extinction des espèces animales et végétales a atteint des seuils irréversibles, la pollution des sols et de l’eau continue, tandis que l’extraction des ressources fossiles s’étend sur toujours plus de territoires.
En même temps que la nature, le capitalisme et le libre-échange intégral prônés par l’UE ont détruit et continuent de détruire les sociétés traditionnelles, qui savaient vivre en harmonie avec leur milieu de vie, pour les remplacer par des sociétés de croissance uniformes, formatées par la publicité pour le « toujours plus ». Devenus rivés aux écrans, les individus se ressemblent sans faire société. Dès lors comment résister aux effondrements et au totalitarisme technologique censé y remédier, que des mesures liberticides récurrentes annoncent comme une dictature sanitaire ?
Vers un humain diminué dans un environnement fragilisé
Après l’exploitation de la nature et des êtres humains, l’économie de croissance capitaliste s’en prend maintenant à la nature humaine avec le transhumanisme : les modifications du corps humain, les manipulations génétiques, les biotechnologies militaires et la réalité modifiée sont devenues le premier domaine d’investissement des grandes entreprises.
Diffusé à partir de leurs universités nord-américaines, l’individualisme dogmatique de la culture capitaliste, centré sur les minorités en tous genres, facilite alors le retour sur investissements, tout en affaiblissant la nécessaire solidarité de la majorité, au moment où les inégalités sociales et les dégradations écologiques s’accélèrent.
La croissance c’est la guerre
Loin du doux commerce de proximité, la compétition du libre-échange mondialisé limite la possibilité de « garantir la sécurité de l’approvisionnement » des peuples. D’où des guerres néocoloniales continuelles pour les ressources, le plus souvent cachées comme en Afrique, mais de plus en plus assumées, comme en diabolisant des États pétroliers sur le pourtour de l’Europe, à l’imitation des américains en Irak.
Aujourd’hui, même l’Union Européenne, pourtant officiellement fondée sur la Paix, soutient l’envoi d’armes en Ukraine, pour étendre sa zone de libre échange contre un autre impérialisme capitaliste, dans une guerre « qui ressemble presque à la première guerre mondiale ».
La Décroissance c’est la joie de vivre
Mesure de la puissance, expression du réductionnisme économique et boussole des politiques publiques, le PIB compte tout, sauf ce qui vaut la peine d’être vécu, comme l’émerveillement devant la nature et l’interdépendance du monde vivant. La soupe de légumes du jardin, les chants d’oiseaux, la pluie ou les montagnes enneigées ont-ils un prix ? Nous préférons alors l’intelligence animale à la bêtise artificielle, pour embrasser la complexité de la biosphère et célébrer les symbioses qui nous rendent vivants.
La liberté ne consiste pas à s’affranchir des limites physiques de la nature, mais bien à en prendre la mesure pour sauvegarder un environnement habitable et des sociétés décentes. Pour y parvenir, nous assumons nous inspirer des sociétés résilientes du passé, qui savaient laisser l’économie à sa juste place. C’est pourquoi nous voulons relocaliser les productions indispensables dans des bio-régions autosuffisantes, de la taille des anciennes régions, pour construire des sociétés de post-décroissance écologiquement viables et socialement souhaitables.
Les premières étapes d’une transition décroissante, qui garantisse l’essentiel du bien vivre aux plus nombreux, sont les suivantes :
Consommation : réduire les consommations inutiles par une taxation différentielle des marchandises et des services suivant l’utilité sociale, les nuisances écologiques, la taille de l’entreprise… Supprimer ou taxer lourdement la publicité, la mode, le luxe, l’avion, les bolides urbains, les produits toxiques, les grandes surfaces, le nucléaire, la production de déchets, les technologies abrutissantes. Rendre les produits manufacturés durables et réparables.
Production : relocaliser les productions essentielles et assumer un protectionnisme territorial sur les marchandises, les services et les capitaux nécessaires aux sociétés humaines, pour favoriser dans l’ordre : le local, notamment pour l’alimentation : les carottes doivent venir du pays ; le régional, dans le cadre de bio-régions autonomes à construire, ne dépassant pas leur biocapacité de charge ; le national, pour tenir compte de la réalité des États et des langues ; le continental, pour tenir compte de l’imbrication actuelle des économies entre États européens. Transport des marchandises sur rails ou bateaux, objectif zéro camions internationaux à l’horizon 2050.
Fiscalité : réduire les inégalités de revenu et de patrimoine dans une fourchette de 1 à 4, pour réduire la consommation et le gaspillage signe de distinction sociale, afin de diviser par 4 l’impact écologique ; appauvrir les riches sera bon pour la planète comme pour la décence commune. Diminuer la fiscalité du travail, ressource abondante et augmenter celle sur l’énergie et les matières premières pour les économiser. Renationaliser les banques et soutenir les monnaies régionales et locales.
Migrations : diminuer les excès migratoires en relocalisant l’économie et en sortant des fables libérales des grands patrons sur la liberté de circuler, qui justifient l’errance économique au service de l’exploitation salariale, alors que chacun aspire d’abord à pouvoir vivre dans son pays. Sortir du « développement », cet autre nom de la croissance motivée par le profit qui éteint toute culture autre que celle de l’occident : sortir des accords de libre-échange signés par l’Europe, réduire les cultures d’exportation et multiplier les cultures vivrières ; stopper les expulsions de paysans et permettre à tous de jardiner tranquillement pour se nourrir. Permettre l’auto-suffisance, plutôt que le consumérisme ou la misère moderne. En attendant, savoir accueillir les migrants chassés par le changement climatique et nos guerres néocoloniales
Alimentation et agriculture : relocaliser les productions agricoles sur la base d’un socialisme agraire à base familial ou coopératif, avec des paysans qui travaillent à reconstruire des petites fermes en polyculture élevage visant l’équilibre agro-sylvo-pastoral. Le soutien aux structures qui permettent d’apporter des solutions concrètes comme Terre de liens est une priorité. Les techniques de production seront plus simples. Cela passe également par une augmentation du nombre de paysans et de paysannes, une dé-métropolisation et une alimentation adaptée aux capacités des terres agricoles. Le lien entre producteurs et consommateurs peut être plus direct. Prendre soin des plantes redonne du sens au travail. Partager les fruits du jardin dans la convivialité redonne du sens à la vie.
Démocratie : relocaliser les décisions dans les bio-régions, les départements et les communes, sans perdre la solidarité globale. Pour y parvenir, instaurer à côté de chaque assemblée élue, des assemblées populaires tirées au sort, disposant d’un droit de veto sur les décisions et du droit de convoquer des jurys citoyens pour mieux éclairer leur choix. Permettre des référendums d’initiative citoyenne à intervalles réguliers.
Europe : sortir de cette U.E. toute entière organisée autour de la compétition du libre-échange pour reconstruire une coopération européenne. Nos propositions vont dans le sens d’une confédération de peuples indépendants, libérés de l’Otan, acceptant la multipolarité du monde, et organisés en bio-régions autonomes, dans une perspective de relocalisation des productions et des consommations de base. Pour empêcher la réémergence d’une technocratie européenne, un Sénat des peuples européens, constitué de citoyens ordinaires disposant d’un droit de blocage sur toutes les décisions, garantirait efficacement le pouvoir des peuples dans la coopération européenne à reconstruire.